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14/02/2014

Qu’attendre des « class actions » à la française ?

Depuis plusieurs années, nombreux étaient ceux qui militaient pour la création, dans notre système judiciaire, d’un mécanisme similaire à celui des « class actions » américaines. Le vendredi 14 février 2014, le Parlement a adopté définitivement le projet de loi sur la consommation permettant aux consommateurs de se regrouper pour intenter des actions en justice.

Photo : Mathieu GLEIZES

L’action de groupe, la version « francisée » des class actions

Le vendredi 14 février 2014, le Parlement, par des votes du Sénat et de l’Assemblée nationale, a adopté définitivement le projet de loi sur la consommation permettant aux consommateurs de se regrouper pour intenter des actions en justice.

Depuis plusieurs années, nombreux étaient ceux qui militaient pour la création, dans notre système judicaire, d’un mécanisme similaire à celui des « class actions » américaines, qui devait intéresser le droit des victimes.

Le gouvernement avait annoncé sa possible introduction législative : c’était finalement au Sénat que revenait l’initiative d’une proposition de loi visant à la création d’une action de groupe (proposition de loi portant création d’une action de groupe du 28 janvier 2013).

Le fonctionnement de l’action de groupe

Il y était proposé l’introduction, au sein du Code de la consommation, d’un article L. 422-1 disposant que : « Lorsque plusieurs personnes ont subi des préjudices, du fait d’un même professionnel, en violation du droit de la consommation, de la concurrence, du droit financier, du droit boursier, du droit de la santé ou du droit de l’environnement, toute association peut agir en justice en vue de faire reconnaître la responsabilité du professionnel à l’égard de tous les demandeurs placés dans une situation identique ou similaire. »

Au regard des affaires sanitaires de ces dernières années (hormone de croissance, Médiator, prothèses PIP, pilules, etc.), et du nombre important de leurs victimes, certains s’étaient penchés sur la possibilité d’un regroupement des litiges aux fins d’obtenir un délai de traitement raisonnable.

Ce type de dispositif d’action a pour finalité d’éviter l’engorgement inutile des juridictions alors même que le droit à indemnisation ne fait pas (ou peu) de doute.

Le mécanisme anglo-saxon des class actions apparaissait, pour beaucoup, extrêmement attrayant.

Fallait-il pour autant se préparer à voir bientôt des « Erin Brockovich » agir dans nos contrées ? (Erin Brockovich : militante écologiste américaine rendue célèbre pour avoir découvert une pollution des eaux potables en Californie. Elle a obtenu une indemnisation particulièrement importante pour les victimes de cette pollution en agissant contre la Pacific Gas and Electric Company. Son histoire est relatée dans le film de même nom de Steven Soderbergh où elle est incarnée par Julia Roberts).

Rien n’était moins sûr.

En effet, spécificité française oblige, le mécanisme qu’a souhaité instaurer in fine le gouvernement est bien éloigné de celui mis en place par « nos oncles d’Amérique ».

Une action avec un périmètre limité

Le gouvernement s’est, en définitive, dirigé vers la possibilité de ne réserver cette action qu’aux « petites affaires, suivant l’avis du CNC (Conseil national de la Consommation) rendue en décembre 2012.

Dans ce cadre, seules les associations de victimes peuvent être autorisées à ester en justice sur ce fondement.

Favorable à l’introduction d’une action de groupe élargie à l’ensemble des victimes, (Voir sur ce point la résolution adoptée en juillet 2012) ce point avait, bien entendu, obligé le Conseil National des Barreaux à réagir vivement.
Son président, Maître Christian Charrière-Bournazel, déclarait ainsi que le Conseil était « vent debout » contre cette proposition.

En l’état actuel des choses, la réforme vient donc s’inscrire dans le Droit des victimes… mais de manière limitée et bien circonscrite.

De plus, les domaines de la santé et de l’environnement sont exclus par ce texte du champ de l’action de groupe.

Dans ces domaines, le gouvernement renvoie l’action collective en justice à la « loi de santé » qui devrait être présentée courant 2014.

Que peuvent, en définitive, attendre les victimes des futures « class actions » à la française ? Malheureusement… pas grand-chose.

Actualisation : en savoir plus sur les actions de groupe

À lire sur le site du Centre de documentation Économie Finances, l’article sur sur les actions de groupe : https://www.economie.gouv.fr/cedef/action-de-groupe