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08/06/2014

Un décret relatif au contrôle des compétences médicales et para-médicales

Un décret relatif aux « procédures de contrôle de l’insuffisance professionnelle » donne désormais les moyens aux instances ordinales chargées du contrôle, de sanctionner les contrevenants à leurs obligations annuelles de développement personnel continu.

Deux personnels médicaux assis devant une tablette numérique

L’évaluation des compétences médicales et para-médicales en question

La loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi « HPST » avait posé le principe selon lequel « le développement professionnel continu a pour objectif l’évaluation des pratiques professionnelles, le perfectionnement des connaissances, l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins ainsi que la prise en compte des priorités de santé publique et de la maîtrise médicalisée des soins. »

L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) avait relevé l’absence de sanction des professionnels de santé qui ne respecteraient pas leur obligation de formation professionnelle continue (Développement Personnel Continu).

L’absence de sanctions remise en question

La publication au journal officiel d’un décret (N° 214-545 du 26 mai 2014) donne désormais les moyens de sanctionner ceux qui ne respectent pas cette obligation légale.

Deux types de sanctions sont prévus :

  •  Le refus d’inscription à l’Ordre
  •  La suspension temporaire d’exercice

Ce décret concerne le praticien qui ne remplirait pas des conditions nécessaires de compétence et vise à empêcher un exercice professionnel dangereux.

Pour les médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes, sont modifiés les articles R.4112-2 et suivants, R. 4124-3 et suivants et R.4126-30 du Code de la santé publique.

Les trois éléments principaux de cette procédure sont :

  •  Un « doute sérieux » sur la compétence professionnelle du demandeur qui amène le Directeur Général de l’Agence Régionale de Santé ou le Conseil départemental de l’Ordre à saisir le Conseil régional ou interrégional.
  •  Un rapport qui devra prouver « une insuffisance professionnelle rendant dangereux l’exercice de la profession »
  •  Des obligations de formation permettant à nouveau au praticien d’exercer.

Sur le plan strictement procédural : 

  •  Le Conseil régional ou interrégional est saisi soit par le directeur général de l’ARS, soit par une délibération du conseil départemental ou du conseil national. Ces saisines ne sont pas susceptibles de recours.

L’établissement d’un rapport

La suspension ne peut être ordonnée que sur un rapport motivé :

1° Pour les médecins, ce rapport est établi par trois médecins qualifiés dans la même spécialité que celle du praticien concerné, désignés comme experts, le premier par l’intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. Ce dernier est choisi parmi les personnels enseignants et hospitaliers titulaires de la spécialité. Pour la médecine générale, le troisième expert est choisi parmi les personnels enseignants titulaires ou les professeurs associés ou maîtres de conférences associés des universités.

2° Pour les chirurgiens-dentistes, le rapport est établi par trois chirurgiens-dentistes, le cas échéant, qualifiés dans la même spécialité que celle du praticien concerné, désignés comme experts, le premier par l’intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. Ce dernier est choisi parmi les enseignants, le cas échéant, de la spécialité.

3° Pour les sages-femmes, le rapport est établi par trois sages-femmes désignées comme experts, le premier par l’intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. Ce dernier est choisi parmi les sages-femmes enseignantes ou les directrices d’école de sage-femme.

En cas de carence de l’intéressé lors de la désignation du premier expert ou de désaccord des deux experts lors de la désignation du troisième, la désignation est faite, à la demande du conseil régional ou interrégional, par ordonnance du président du tribunal de grande instance dans le ressort de la résidence professionnelle de l’intéressé. Cette demande est dispensée de ministère d’avocat.

L’examen des connaissances théoriques et pratiques du praticien

Les experts procèdent ensemble, sauf impossibilité manifeste, à l’examen des connaissances théoriques et pratiques du praticien. Le rapport d’expertise est déposé au plus tard dans un délai de six semaines à compter de la saisine du conseil. Il indique les insuffisances relevées au cours de l’expertise, leur dangerosité et préconise les moyens de les pallier par une formation théorique et, si nécessaire, pratique. Si les experts ne peuvent parvenir à la rédaction de conclusions communes, le rapport comporte l’avis motivé de chacun d’eux. Si l’intéressé ne se présente pas à la convocation fixée par les experts, une seconde convocation lui est adressée. En cas d’absence de l’intéressé aux deux convocations, les experts établissent un rapport de carence à l’intention du conseil régional ou interrégional, qui peut alors suspendre le praticien pour présomption d’insuffisance professionnelle rendant dangereux l’exercice de la profession.

Avant de se prononcer, le conseil régional ou interrégional peut, par une décision non susceptible de recours, décider de faire procéder à une expertise complémentaire.

Si le Conseil régional ou interrégional n’a pas statué dans le délai de deux mois à compter de la réception de la demande dont il est saisi, l’affaire est portée devant le Conseil national de l’ordre.

La décision de suspension

La décision de suspension définit les obligations de formation du praticien.

La notification de la décision mentionne que la reprise de l’exercice professionnel par le praticien ne pourra avoir lieu sans qu’il ait, au préalable, justifié auprès du conseil régional ou interrégional avoir rempli les obligations de formation fixées par la décision.

Le praticien qui a fait l’objet d’une mesure de suspension totale ou partielle du droit d’exercer ne peut reprendre son activité sans avoir justifié auprès du conseil régional ou interrégional avoir rempli les obligations de formation fixées par la décision. Dans ce cas, ce conseil décide que le praticien est apte à exercer sa profession et en informe les autorités qui ont reçu notification de la suspension.

S’il apparaît que les obligations posées par la décision n’ont pas été satisfaites, la suspension de l’intéressé est prolongée.

Pour les autres professionnels de santé

Les pharmaciens :

La procédure pour suspension temporaire pour infirmité ou état pathologique de l’article R 4221-15 est précisée et détaillée dans les articles R4221-15-1 à R4221-15-3 qui reprennent les mêmes dispositions que celles des professions médicales.

La possibilité de ne pas interdire toute activité est maintenue, mais avec obligation de se faire assister. 

La procédure pour insuffisance professionnelle décrite aux articles R. 4221-15-4 à R.4221-15-6 du Code de la santé publique est identique à celle des professions médicales.

Le rapport motivé est établi à la demande du Conseil régional ou du conseil central compétent « par trois pharmaciens relevant de la même section que celle du pharmacien concerné, désignés comme experts, le premier par l’intéressé, le deuxième par le conseil régional ou le conseil central compétent et le troisième par les deux premiers experts parmi les pharmaciens enseignants. »

Les infirmiers :

Ce sont les articles R.4311-42 et R. 4311-53 du Code de la santé publique qui sont modifiés en faisant un renvoi aux dispositions applicables aux professions médicales tant pour la suspension temporaire du droit d’exercer pour insuffisance professionnelle que pour la suspension temporaire du droit d’exercer pour infirmité ou état pathologique. Pour les infirmiers, « le rapport est établi par trois infirmiers qualifiés, le cas échéant de la même spécialité que celle de l’infirmier concerné, désignés comme experts, le premier par l’intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. Ce dernier est choisi parmi les infirmiers enseignants, le cas échéant, de la même spécialité que l’infirmier concerné ».

Concernant les masseurs-kinésithérapeutes et les pédicures podologues :

Les articles R.4323-2, D. 4323-2-1 et R.4323-2-1, R. 4323-2-2 du Code de la santé publique sont modifiés par renvoi aux dispositions relatives aux professions médicales. 

Pour les masseurs-kinésithérapeutes : « Le rapport est établi par trois masseurs-kinésithérapeutes en exercice désignés comme experts, le premier par l’intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. Ce dernier est choisi parmi les enseignants en masso-kinésithérapie. »

En ce qui concerne les pédicures-podologues : « Le rapport est établi par trois pédicures-podologues désignés comme experts, le premier par l’intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. Ce dernier est choisi parmi les professionnels compétents dans le domaine de la formation et de l’analyse des pratiques professionnelles en pédicurie-podologie. »